Le découplage entre les Etats-Unis et la Chine, un concept qui a émergé récemment pour caractériser une nouvelle ère du rapport entre les deux super puissances mondiales. Mais qu’est qu’on entend par découplage ?
Nous publions deux articles pour comprendre la réalité du découplage entre les Etats-Unis et la Chine. Comment il influe les politiques des deux pays et son impact en termes de coûts. Première partie.
Le couple que forment les États-Unis et la Chine semble inextricable en raison de leur relation directe et de leurs rôles respectifs dans la chaîne d’approvisionnement mondiale.
La relation commerciale directe pour les biens et services était de 737,1 milliards de dollars en 2018, avant le début de la guerre commerciale. Si l’on tient compte des marchés de pays tiers par lesquels transitent les échanges de biens intermédiaires entre les États-Unis et la Chine, ce nombre est encore plus élevé.
Pourtant, les hypothèses politiques sous-jacentes qui favorisent cette intégration sont désormais remises en question dans les deux pays. Les calculs de base sur les intentions stratégiques et économiques respectives ont changé et un accord implicite entre Pékin et Washington sur la relation commerciale semble s’être rompu.
Les débats politiques qui en résultent dans les deux pays ont donc des conséquences considérables. Les deux parties ont des raisons légitimes d’envisager une relation alternative, mais si les États-Unis et la Chine devaient systématiquement mettre un terme à leur engagement économique – en un mot, se découpler – cela ne serait pas sans frais.
Identifier les conséquences et les coûts réels du découplage est urgent car les premières étapes vers un tel acte ont déjà été franchies. Les États-Unis débattent (à la fois dans les discussions stratégiques publiques et privées) pour savoir si et comment continuer sur cette voie. La perspective d’un découplage entre les États-Unis et la Chine n’a jamais été aussi réelle.
Le China Center de la Chambre de commerce américaine préconise depuis longtemps une approche équilibrée et rationnelle des relations commerciales avec la Chine. Cette approche comprenait à la fois de la patience et de l’enthousiasme pour les progrès vers l’ouverture dans les années qui suivirent l’adhésion à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et, de plus en plus, appelait Pékin à rendre compte des politiques qui visiblement ne respectaient pas les promesses incarnées par l’entrée à l’OMC.
Pourtant, alors que les ambitions internationales de la Chine ont continué de croître, soutenues par l’utilisation de plus en plus coercitive de l’élaboration de la politique économique, son engagement en faveur de normes d’économie ouverte et fondées sur le marché a augmenté de façon significative.
Des initiatives d’innovation de la Chine en 2009, à Made in China 2025 en 2015, en passant par une nouvelle génération de contrôles étatiques sur les données, Pékin a déployé un mélange de limites d’accès au marché, de politiques industrielles et de restrictions réglementaires pour soutenir la position concurrentielle des entreprises nationales. et réduire la dépendance vis-à-vis de la technologie et de l’expertise étrangères. La plupart des économies avancées choisissent d’amortir les effets du libéralisme de marché pour des raisons politiques ou de sécurité.
Pékin a rendu explicites ses plans pour dépasser et remplacer les principales entreprises technologiques internationales, suscitant des inquiétudes compréhensibles concernant le champ économique mondial et la sécurité nationale.
Le virage croissant de Pékin vers l’illibéralisme a changé le débat politique chinois à Washington au cours de la dernière décennie, et suscite maintenant des questions difficiles ailleurs également. Au milieu des années 2010, de nombreux habitants de Washington estimaient que la Chine était plus un concurrent qu’un partenaire. À la fin de l’ère Obama, Washington repoussait Pékin avec un filtrage plus strict des investissements, tout en examinant de près les vulnérabilités de haute technologie dans l’industrie des semi-conducteurs.
Sur la base de ce changement stratégique, des politiques moins permissives à l’égard de la Chine ont été développées dans l’ensemble par le gouvernement américain.
Les exemples incluent une approche plus restrictive des acquisitions étrangères d’entreprises américaines en raison de problèmes de sécurité (Foreign Investment Risk Review Modernization Act of 2018 (FIRRMA)); l’utilisation élargie des contrôles à l’exportation pour empêcher les transferts de technologies sensibles (loi de 2018 sur la réforme du contrôle des exportations (ECRA)); l’imposition extraordinaire de droits de douane en vertu de l’article 301 et d’autres autorités de politique commerciale; et la fermeture d’un consulat et l’expulsion de journalistes liés à des préoccupations concernant l’espionnage économique, le contrôle de l’État sur les médias chinois et la réciprocité.
A suivre sur le découplage Etats-Unis – Chine.