Nous sommes loin de la fin de la pandémie. Delta ne sera pas la dernière variante hautement transmissible.
Pourtant, COVID-19 est également un précurseur de pandémies plus nombreuses, et peut-être pires, à venir. Les scientifiques ont averti à plusieurs reprises que sans stratégies proactives considérablement renforcées, les menaces pour la santé mondiale apparaîtront plus souvent, se propageront plus rapidement et feront plus de vies. Avec la diminution de la biodiversité mondiale et la crise climatique, auxquelles elles sont inextricablement liées, les menaces de maladies infectieuses représentent le principal défi international de notre époque.
Reconnaître cette nouvelle réalité d’une ère de pandémie n’est pas alarmiste mais plutôt mettre en oeuvre une politique publique prudente et une politique responsable. Nous devons nous organiser sur la base de l’ensemble de la société au sein des nations et repenser la façon dont nous collaborons à l’échelle internationale pour atténuer ses conséquences profondes sur les moyens de subsistance, la cohésion sociale et l’ordre mondial.
De l’aide à l’investissement stratégique
Surmonter la pandémie d’aujourd’hui reste la tâche immédiate. Mais nous avons également besoin d’une réinitialisation plus fondamentale pour éviter de sombrer encore et encore dans des pandémies aux coûts humains et économiques énormes. Le système actuel de sécurité sanitaire mondiale n’est pas adapté à son objectif. Il est trop fragmenté, trop dépendant de l’aide bilatérale discrétionnaire et dangereusement sous-financé. Nous devons réparer le système d’urgence. La prochaine pandémie pourrait frapper à tout moment.
Nous ne pouvons pas éviter complètement les épidémies. Mais nous pouvons réduire considérablement le risque qu’ils dégénèrent en pandémies. Le monde a les capacités scientifiques et technologiques et les ressources financières pour le faire. Cependant, pour mobiliser ces ressources, nous avons besoin d’une nouvelle façon de penser la coopération internationale.
Plutôt que de financer la sécurité sanitaire mondiale sous le couvert de « l’aide aux autres nations », nous devons la traiter comme un investissement stratégique dans les biens publics mondiaux qui profitent à toutes les nations, riches ou pauvres.
Le Groupe des 20 principales économies avancées et en développement (G20) a établi un groupe d’experts indépendants de haut niveau (HLIP) pour procéder à un examen complet des lacunes dans les biens publics mondiaux.
Nous avons besoin d’un réseau de surveillance génomique à grande échelle, intégrant des capacités nationales, régionales et mondiales. Un tel réseau est essentiel pour détecter et partager instantanément des informations sur les agents pathogènes qui pourraient provoquer des épidémies de maladies infectieuses, identifier leurs séquences génomiques et accélérer le développement de contre-mesures médicales.
Nous devons également combler les lacunes de longue date dans les capacités de soins de santé de base au sein des pays pour contrecarrer les maladies infectieuses émergentes et endémiques et atténuer les comorbidités.
Capacité d’approvisionnement mondiale
Il est également crucial de renforcer la capacité mondiale nécessaire pour accélérer radicalement l’approvisionnement en vaccins et autres matériels vitaux afin d’éviter de prolonger une pandémie et de répéter les inégalités d’accès stupéfiantes que COVID-19 a révélées.
Nous avons besoin d’un écosystème de développement, de fabrication et de livraison réparti à l’échelle mondiale, qui reste utilisé en temps normal et qui peut pivoter rapidement pour fournir les contre-mesures médicales spécifiques à chaque pandémie.
Nous ne pouvons donc construire l’écosystème d’approvisionnement nécessaire qu’à travers une grande initiative d’investissement public-privé.
Pour combler ces lacunes majeures dans les biens publics mondiaux, nous devons investir collectivement à une échelle bien plus importante que ce à quoi nous avons été disposés par le passé.
Cependant, pour réussir à éviter la prochaine pandémie, nous devons renforcer le multilatéralisme.
Premièrement, nous devons mettre les finances de l’OMS sur une base multilatérale plus sûre et lui donner les moyens de remplir plus efficacement ses rôles essentiels. Il n’y a pas de solution à la sécurité pandémique qui n’implique une OMS réformée et renforcée
Deuxièmement, nous devons réaffecter les institutions financières internationales (IFI) à une nouvelle ère.
Troisièmement, outre le renforcement de l’OMS et la réaffectation des IFI, nous devons établir un nouveau mécanisme de financement multilatéral pour la sécurité sanitaire mondiale.
Une fenêtre d’action étroite pour agir
Repenser le multilatéralisme n’a jamais été aussi urgent. La fenêtre d’action est étroite. Comme le montre l’expérience des crises précédentes, l’élan pour faire des changements audacieux s’estompera une fois que nous aurons passé le pire de la pandémie dans les pays les plus riches.
Nous devons également agir de toute urgence pour réparer la méfiance profonde et croissante à l’égard du système mondial dans les régions en développement qui ont eu peu d’accès aux fournitures vitales. Ne pas renverser ce déficit de confiance aura des conséquences durables. Il sera très difficile de faire face au changement climatique, aux futures pandémies et à d’autres problèmes dans un monde dangereux.
Article source : Rethinking Multilateralism for a pandemic era